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La sauvegarde des perdrix grises

  • Session : 2014-2015
  • Année : 2014
  • N° : 56 (2014-2015) 1

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  • Question écrite du 05/12/2014
    • de DENIS Jean-Pierre
    • à COLLIN René, Ministre de l'Agriculture, de la Nature, de la Ruralité, du Tourisme et des Infrastructures sportives, délégué à la Représentation à la Grande Région

    La perdrix grise est en constant déclin depuis une cinquantaine d'années au point d'avoir disparu d'une partie importante de son aire de répartition. Les causes de sa disparition sont connues : disparition des habitats, manque de nourriture dans les monocultures, pratiques agricoles et présence de prédateurs.

    Elle est ainsi considérée par Wallonie comme étant une espèce menacée et vulnérable. Pour éviter qu'elle ne disparaisse, la piste d'une interdiction de sa chasse a été avancée, mais rejetée, car les chasseurs, constitués en associations cynégétiques, seraient indispensables pour sauver l'espèce. La Ligue royale belge pour la protection des oiseaux s'inquiète du déclin des perdrix grises allant jusqu'à « disparaître totalement de plus de la moitié du territoire wallon et de continuer un déclin catastrophique dans la Hesbaye et l'ouest du Hainaut ». L'Atlas des oiseaux nicheurs de Wallonie 2001-2007 les présente comme étant dans un risque réel d'extinction.

    Face à ce constat de potentielle disparition, quelles sont les mesures mises en place pour protéger cette espèce menacée ?

    N'est-il pas envisageable d'en interdire la chasse, ne serait-ce que pour quelques années, afin de permettre à l'espèce de se reproduire ? En Région bruxelloise, où la chasse n'est plus autorisée, la perdrix grise se maintient, et ce, malgré une urbanisation croissante.

    Une autre piste pourrait être un travail en commun entre les agriculteurs et les chasseurs afin de restaurer les habitats et lutter contre prédateurs. Qu'en pense Monsieur le Ministre ?
  • Réponse du 24/12/2014
    • de COLLIN René

    La perdrix est considérée comme patrimoniale et comme un bon baromètre de l’état environnemental des plaines cultivées (espèces « bio-indicatrice »).

    Il faut malheureusement le reconnaître : la perdrix est en déclin de manière assez générale, non seulement en Wallonie, mais aussi ailleurs en Europe de l’Ouest. Je m’étonne donc quelque peu de la remarque de l'honorable membre quant au maintien de l’espèce dans la région très urbanisée de Bruxelles.

    Il convient toutefois de ne pas généraliser ce déclin. Localement, des populations sont en effet encore bien développées chez nous, en particulier dans le Hainaut. Il faut aussi noter que l’on observe les plus fortes tendances à la hausse dans des territoires chassés. Cela s’explique par l’intérêt porté par les chasseurs à la conservation de l’espèce. C’est souvent suite aux démarches de chasseurs auprès des agriculteurs que l’habitat de l’espèce est amélioré au bénéfice de la perdrix, mais aussi de toute la petite faune des plaines. Il est intéressant de noter à ce sujet qu’environ trois quarts des bandes « faune » installées en plaine dans le cadre du programme des mesures agro-environnementales le sont à l’instigation des chasseurs qui tentent d’améliorer les habitats de leur territoire.

    Une interdiction de la chasse pénaliserait certainement les efforts de ces nombreux gestionnaires et n’offrirait en contrepartie absolument aucune garantie d’un effet positif sur les populations de perdrix.

    Une grande majorité des environnementalistes eux-mêmes ne mettent pas en cause la chasse et je ne vois pas non plus l’intérêt de le faire. Une interdiction de la chasse de la perdrix risquerait d’être contreproductive pour l’espèce et d’autres aux besoins similaires.

    Comme le souligne l'honorable membre, il est très clairement démontré par de nombreuses études que la perdrix grise, comme d’ailleurs bon nombre d’espèces non chassées de l’avifaune des plaines, en déclin également, telles que le bruant proyer et l’alouette des champs, souffre en fait d’une dégradation de son habitat. Celle-ci est induite par l’évolution des vingt dernières années de l’agriculture (monoculture et agrandissement du parcellaire provoquant la destruction des éléments du paysage et des repères, effets directs et indirects des pesticides, etc.).

    Comme piste envisagée pour une amélioration des habitats, il serait évidemment essentiel d’avoir un partenariat entre agriculteurs, naturalistes et chasseurs. En effet, ces derniers n’ayant pas, dans leur majorité, le contrôle du foncier, ils ne peuvent pas restaurer ou améliorer les habitats de leurs territoires. On estime que les linéaires de type « hautes herbes » (haies basses avec ourlets enherbés, talus, berges, etc.) devraient s’étendre sur sept kilomètres par cent hectares pour répondre aux exigences de la perdrix grise. De même, il serait recommandé d’équiper la plaine d’un minimum d’un hectare pour cent hectares de cultures non récoltées et produisant des graines pour en fournir aux espèces hivernant chez nous ou migratrices.

    En plus d’une incitation réelle à une adhésion massive au programme agri- environnemental pour créer un maillage écologique suffisant et optimum, l’intégration de la protection de la biodiversité dans certains systèmes de production nécessite une longue sensibilisation et beaucoup de concertation. Le verdissement annoncé de la Politique agricole commune est une étape dans cette direction.